Fun is money : quand les entreprises font joujou

Toboggan, trampoline, trottinettes électriques, ping-pong et jeux vidéo… Non, vous n’êtes pas dans un air de jeux interdit au plus de 18 ans mais bel et bien à la porte de votre nouvel emploi. Alors que les start-ups développent le “syndrome du baby-foot’, les plus grandes entreprises adoptent aussi ce vent de coolitude pour devenir de véritables usines à rêves jusqu’à consacrer 25% de leurs locaux aux espaces de distractions. Lorsque le bonheur au travail est poussé à son paroxysme, le jeu est-il un réel outil ou une infantilisation de l’adulte ?

Les bureaux Google à Boston
Les bureaux Google à Boston

Les règles du jeu ont changé

Rappelez-vous de ce jeune cadre en costume noir, gambadant gaiement dans l’herbe après avoir succombé à un délicieux Kinder. La marque nous parlait déjà de ‘l’enfance à taille adulte’… Aujourd’hui, cette philosophie semble avoir inspiré plus d’une entreprise, qui adoptent alors la devise : “Life is a game” !

Le monde du travail accueille à bras ouverts le ludisme revêtant 1001 formes : escape games, applications, jeux de société, activités sportives et jeux vidéo… Dans son ouvrage l’empire du ludique, Aurélien Fouillet affirme alors que notre société est ‘un nouveau monde conquis par l’esprit du jeu’.

Et pourquoi pas ? Si le jeu a longtemps été réservé à l’enfance, il retrouve ses lettres de noblesse auprès des plus de 18ans. Le jeune agitateur de consciences Idriss Aberkane explique de son côté que le jeu est la manière la plus naturelle et la plus rapide d’apprendre. Le retour à l’enfance permet de développer des qualités que l’adulte perd souvent lorsqu’il grandit, comme la créativité. Douceur.

En s’insérant dans la sphère professionnelle, les pratiques ludiques se complexifient tout de même un peu plus. Petit, jouer à la marchande permet déjà d’aborder certaines notions de négociations et de ventes mais pour les grands le terme ‘serious game’ fait son apparition. Le jeu peut être un levier de motivation et de pédagogie, un outil de management et un vecteur d’apprentissage pour appréhender le social.

Alors, votre prochain mot à caser pour briller en société : ‘gamification’ ( ou ludification pour les anglophobe). A vous de rajouter : “Oui, c’est l’intégration de mécanismes ludiques dans la société”.

Mais qui se laisse prendre au jeu ?

La méthode Lego Serious Play vient booster les employés en entreprises
La méthode Lego Serious Play vient booster les employés en entreprises

L’âge, c’est dans la tête

On doit cette montée en puissance du fun en entreprise à notre chère génération Y. Nourrie par l’intrusion du numérique et des jeux vidéo dans la sphère familiale, ils entretiennent des rapports sociaux différenciés ; les limites entre amis / famille / travail sont moins nettes et cela impacte le comportement professionnel qu’ils ont.

Nos jeunes boudent les anciens modèles d’entreprises. Ils sont plus attentifs aux avantages immatériels, comme l’ambiance de travail, et se soucient plus de leur environnement. Le baby-foot devient la nouvelle voiture de fonction comme le dirait Bejoue une agence de communication et d’événementiel spécialisée dans la ludification.

En effet, la nouvelle génération est en recherche de ce que peuvent développer les structures professionnelles en terme de fun ; de ce fait, ces dernières en viennent à adopter une réelle démarche de séduction de peur de voir les talents leur glisser entre les doits. Le processus de recrutement s’inverse.

Mais tout le monde est logé à la même enseigne : le jeu ne s’adresse pas qu’aux jeunes. Une étude à montrée que l’âge que l’on pensait avoir avait plus d’impact sur nos actes que l’âge que l’on a réellement : jouer permettrait de se sentir plus jeune et donc d’augmenter la productivité des salariés et remplir plus facilement ses objectifs. *A nos seniors de se rendre aux réunions en toboggan et à finalement dévoiler leur talent caché au ping-pong.

Alors, les espaces détentes fleurissent à vitesse grand V ; dans les 66 entreprises où il fait bon vivre dans le classement de 2016 (d’après une enquête Great Place to Work), entre 20% et 25% des locaux sont dédiés aux espaces détente.

Le toboggan chez Linkbynet
Le toboggan chez Linkbynet

Fun IS money

“ jeu = motivation = investissement = productivité = money”

En voilà une belle adéquation ! Aussitôt dit aussitôt fait : les plus grosses entreprises s’empressent de se transformer en véritable terrain de jeux pour adultes.

Du côté de la Sillicon Valley par exemple, Google intègre une close bien sympathique aux contrats des employés pour qu’ils consacrent 10% de son temps à jouer. Et pourtant, lorsque l’on sait que le turnover est de 1,8 an, on peut se questionner sur le pouvoir de motivation d’un tel modèle.

Apparemment, tout le monde n’est pas joueur : là où certains voient de l’engagement (+48% selon NudgeReward), d’autres y voient de l’addiction… Là où on y voit de la motivation, il développe pour d’autres une compétition abusive.

Le syndrome du baby-foot est alors à double tranchant. Si les jeux permettent de créer du lien, de mieux discuter et de faire remonter les problèmes, il est parfois pointé du doigt comme une “illusion de coolitude” , de la “poudre aux yeux” permettant aux entreprises d’en demander encore plus à leurs employés.

Il s’agit alors d’adopter une cohérence managériale avec la ludification des espaces et des pratiques pour mener une politique de travail efficace ; cela par un salaire décent, assurer une bienveillance au travail, des rapports cordiaux, un planning respectable.

#Inspiration : les salles de jeux d’entreprises les plus folles

Tout réside donc dans la modération, même si parfois l’imaginaire laisse place à l’extraordianire… en témoignent ces quelques exemples d’espaces à couper le souffle :

Le cabane dans les arbres de Inventionland
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La chaussure géante de Inventionland
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Le “CandyWall” de HubSpot, pas de régime à suivre !
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Les petits manèges de la cafétéria chez Candy Crush
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Chez Etsy, les structure suspendues donnent des airs de Avatar
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Chez Prestashop, le “Bungalow” en jette de toutes les couleurs
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Les bureaux de Cardlytics, solutions de données bancaires
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Terrain de jeux de Valley Forge Fabrics, une fabrique de textile pour l’industrie hospitalière
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Dans les bureaux de Avast, on ne plaisante pas avec le golf  

Chez Artefact, entreprise d’innovation et de technologie pour “un meilleur futur” : ça se joue aux palets !
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‘Chill’, devis de l’espace coworking Wave ! Entre deux allés retours de balançoires..
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Dan Lyons nous fait le récit de son aventure au sein de HupSpot dans la Sillicon Valley : il entre dans les coulisses d’une entreprise aux pratiques si farfelues qu’il décide de partager son histoire avec le reste du monde à travers son ouvrage “My Misadventure in the Start-up Bubble”. Chez HubSport, on trouve une chaise vide lors des réunions pour représenter un client fictif. Sauf que chez eux, le client imaginaire prend la forme d’un adorable ours en peluche nommé Molly. Cependant, la concentration reste toujours à son maximum, n’est-ce-pas ?

L’ours en peluche, Molly
L’ours en peluche, Molly

Chez OfficeRiders aussi il est facile d’alterner entre fun et sérieux : un hamac, une piscine, un billard… Choisissez un espace unique et atypique pour réveiller votre travail.

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